Saviez-vous que 90 % des produits de la mer consommés en France sont importés ? Mais depuis 1990, à Cherbourg, d’irréductibles optimistes élèvent des saumons en pleine mer. Ce fut d’abord un groupe français, puis norvégien, puis des mareyeurs du coin… Depuis dix ans, il s’agit du groupe AMP (Aquaponic Management Project), spécialiste de l’aquaponie et de la pisciculture d’étang, qui élève ici des saumons français vendus sous les marques Saumon de France et Saumon d’Isigny.
Élever des saumons dans la Manche, où la température de la mer dépasse désormais les 21 °C en été, est une gageure ! L’organisation est au cordeau : elle commence dans une écloserie, à Chartres, où arrivent des œufs venus d’Écosse ou d’Irlande. Une fois que les poissons deviennent des « smolts » (plus de 90 g), ils rejoignent des bassins d’eau salée à Isigny, pour six mois. Et quand ils atteignent 1,5 kg, direction la ferme marine de Cherbourg, en pleine mer : ici, en plein hiver, dans des eaux bien froides, ils terminent leur croissance pendant six mois supplémentaires.
Les saumons sont vendus en filets, en pavés, et fumés, essentiellement en grande distribution sous différentes marques (Delpeyrat, Guyader, etc.)… mais une partie confidentielle est fumée sur place de façon artisanale. Le salage au sel sec est fait à la main. Le fumage au bois de hêtre est réalisé à la ficelle, puis les tranches sont découpées à la main. Un délice !
Impossible de visiter la ferme marine : elle se situe à 2,5 km des côtes, dans une zone militaire. En revanche, la boutique de Cherbourg permet de découvrir la façon dont Saumon de France travaille, grâce à une serre aquaponique. Avis aux amateurs : c’est aussi là que l’on peut acheter le saumon fumé à la ficelle.
Président de Saumon de France, Pascal Goumain milite pour le retour sur nos tables de ceux qu’il nomme « les poissons oubliés ». « En France, on élevait plein de poissons herbivores dans les étangs de Brenne et de Sologne, mais les poissons de mer plus “faciles” ont pris le pas sur notre consommation. Il faut réapprendre à cuisiner les tanches, les carpes… Je rêve d’une cantine qui servirait des carpes panées ! » Chiche !