À l’extérieur, Rose du Pont affiche un style Belle Époque, emblématique du début du xxe siècle. Mais l’origine du bâtiment reste mystérieuse. On murmure qu’il provient d’une Exposition universelle, qu’il a été démonté puis reconstruit, comme c’était courant dans les années 1900.
L’adresse a évolué au fil des ans : elle fut une pension, un hôtel, puis un bar-restaurant. Quel Chamoniard ne s’est jamais attablé à La Terrasse, à la façade violet-mauve, en activité jusque dans les années 2000 ? Après de longs mois de fermeture, un nouveau chapitre s’ouvre en 2022 : propriétaires depuis peu, Lydie et Laurent Mougenot confient la rénovation complète à Christophe Bro, architecte d’intérieur parisien qui a créé et restauré d’innombrables lieux de convivialité. Quelques coups de crayon et un croquis plus tard, les grandes lignes sont esquissées. La promesse ? Un voyage dans le temps, dans cet espace de 700 m2 : « Je voulais que l’on arrive dans un décor début du siècle, laissant penser que le bâtiment avait toujours été là », explique Christophe Bro.
À peine le sas franchi, les gourmands fondent devant la vitrine à desserts, dessinée telle celle d’une bijouterie, agrémentée de deux ailettes rappelant les malles de voyage. L’excursion peut commencer. La mosaïque, comme une enseigne au sol, apporte une touche rétro tout en saluant ce savoir-faire artisanal trop souvent oublié. De part et d’autre, les banquettes en cuir sont lovées dans des alcôves dessinées par des lames de Dacryl®, en référence aux verres des brasseries d’antan. Ces cocons et leurs tables en marbre rosé d’Alicante cerclé de bois donnent une fausse sensation de symétrie. Des arabesques végétales s’enroulant le long des poteaux créent un lien entre le sol et le plafond du balcon. Au centre se trouvent le bar et sa bibliothèque cathédrale (6,50 mètres de haut) ; 600 siphons en verre habillent ses étagères. Au plafond, un dôme en verre rétroéclairé, inspiré des grands magasins, domine le bar. « L’étage est pensé comme une coursive de théâtre, avec des petits balcons, des moulures, des alcôves, pour un décor très années 1930, confie l’architecte. Puis il y a le coin salon de thé avec des fauteuils crapauds à franges, des lustres tout en élégance, des banquettes en velours. » La décoration est soignée dans les moindres détails, jusqu’aux toilettes. Un lieu où Christophe Bro aime bien surprendre le public, en l’emmenant ici… à bord de l’Orient Express.