Plutôt que de projets d’architecture, vous préférez parler de lieux d’art de vivre… Comment cette perception influence-t-elle votre travail ?
Nous étudions les volumes mais aussi l’histoire des lieux, ce qui nous permet d’ancrer nos idées dans un contexte plus transversal. Nous sommes très attachées à cette vision commune grâce à laquelle nous prenons de la hauteur et travaillons à la cohérence de nos projets. La direction artistique se fait donc à deux, même si l’une (Delphine, NdlR) va plus naturellement prendre en charge la partie agencement et l’autre (Virginie, NdlR), la partie storytelling.
Comment parvenez-vous à créer des espaces à forte personnalité tout en séduisant le plus grand nombre ?
La dimension narrative et l’agencement des espaces sont au cœur de notre réflexion. Nous travaillons sur la cohérence du projet avec comme objectif que le client se sente bien. Si nous attachons une importance particulière au choix des matériaux, des tissus, du dessin des mobiliers, les univers que nous créons sont avant tout libres et décomplexés.
Quel est votre signe distinctif ?
Peut-être notre volonté de faire dialoguer plusieurs influences et époques dans un même lieu, d’apporter de la poésie dans nos projets et de créer des lieux habités, vivants, qui racontent une histoire… Cela se matérialise par des associations parfois inattendues de savoir-faire traditionnels et de références contemporaines, de meubles d’époque et de mobilier dessiné sur mesure, de matières brutes et nobles… Enfin, de manière générale, l’artisanat a une place importante dans nos projets.
Où puisez-vous vos sources d’inspiration ?
Elles sont multiples et transversales. Elles peuvent aussi bien provenir du travail de grands noms du design tels que Gio Ponti ou Carlo Scarpa, de la mode, de l’Histoire, de l’artisanat, de l’art, du cinéma, et même de nos voyages ou de nos rencontres. Nous pensons, notamment pour les projets les plus haut de gamme, qu’il est primordial de renforcer le storytelling en ne s’appuyant pas exclusivement sur l’aspect architectural. Au-delà de l’assiette, les restaurants proposent aujourd’hui une expérience globale, et notre approche permet de créer des univers immersifs qui s’y prêtent particulièrement.
Avez-vous pour habitude de travailler en collaboration avec des chefs ? Comment cela se concrétise-t-il dans l’aménagement et la décoration de vos restaurants ?
Chaque chef a un univers qui lui est propre et que nous essayons de retranscrire à travers nos scénarios décoratifs pour créer du lien entre la cuisine et la salle. Cela valorise leur créativité et renforce la lisibilité des plats. Par exemple, pour Orgueil, dont le parti pris est de cuisiner des produits de proximité, nous avons mis l’accent sur l’artisanat local.
Vous avez signé deux adresses pour le GruppoMimo, à Levallois-Perret et à Asnières, dans les Hauts-de-Seine, ainsi que deux pour Bambini, à Paris et à Megève… Comment réussissez-vous à créer une identité ou un ADN communs tout en préservant la singularité de chaque adresse ?
Pour Bambini, l’emplacement géographique a eu un impact important sur la décoration. Le restaurant parisien fait référence aux jardins, ce qui se retrouve en filigrane dans les espaces avec des fresques, des tissus et des éléments picturaux figuratifs, tandis qu’à Megève, il prend des allures de chalet familial, façon Tyrol italien traditionnel modernisé, coloré et folk. Cependant, dans les deux projets, on retrouve des pièces emblématiques telles que les chaises Bambini ou les grands luminaires en rotin. Pour les adresses du GruppoMimo, le fil rouge est à chaque fois une nouvelle interprétation de la demeure d’un esthète et dandy italien imaginaire, dans laquelle la convivialité et le plaisir de recevoir sont les maîtres mots. L’atmosphère générale se traduit par une ambiance typique des intérieurs transalpins, à la fois élégante et décontractée.
Vous dévoilerez en avril prochain la rénovation d’une adresse mythique, La Pérouse à Nice. Comment avez-vous abordé ce nouveau défi, et pouvez-vous nous en dévoiler les grandes lignes ?
Nous avons imaginé une maison de vacances dans laquelle la mer, par sa proximité, est la protagoniste de la réflexion décorative. On la retrouvera à travers des motifs, mais également des matériaux et des savoir-faire emblématiques de la région, comme la céramique.