L’arrivée au siège social de la maison Vranken Pommery est impressionnante. Inspirée du style néogothique élisabéthain, l’imposante bâtisse imaginée par Madame Pommery au xixe siècle, alors qu’elle dirigeait la maison Pommery, se dresse fièrement sur les hauteurs de la ville de Reims, avec une vue dégagée sur la fameuse cathédrale qui accueillit de nombreux rois de France. Quant au sous-sol, il abrite, dans les crayères gallo-romaines, à 30 mètres de profondeur, non seulement des expositions d’art qui évoluent régulièrement, mais également les nombreux flacons en sommeil, dont ceux des « Clos Pompadour ». « L’art est pour moi indissociable du champagne, confie Nathalie Vranken, directrice générale déléguée de Vranken Pommery Monopole. Avec les nombreuses expositions que nous proposons depuis 2002, sous le nom “Les Expériences Pommery”, nous rendons hommage aux artistes et à la création. Nous ne faisons que prolonger la mémoire de Madame Pommery qui, dès le xixe siècle, avait commandé à Gustave Navlet des bas-reliefs gravés à jamais dans les caves souterraines, et à Émile Gallé le plus grand foudre sculpté. »
C’est dans cet univers onirique que vieillit la cuvée « Les Clos Pompadour », avec les autres de la maison. Ensemble, le long de l’escalier magistral de 116 marches qui mène aux caves, elles côtoient ainsi dans leur sommeil prolongé la « lune imaginaire » de l’artiste coréenne Choi Jeong Hwa, les « gouttes ascensionnelles » en cristal de la Française Léa Barbazanges ou les « Pop Blooms & Stars » des Taïwanais et Japonais Hsiao-Chi Tsai & Kimiya Yoshikawa…
Telle une œuvre d’art, l’assemblage « Les Clos Pompadour » se distingue par son caractère unique, le crémeux de ses bulles, la droiture et la finesse de son expression en bouche sur une finale longue. Plus étonnant, son élevage peut durer près de 20 ans – pour rappel, il est de 15 mois minimum selon la réglementation imposée par le cahier des charges de l’appellation pour une cuvée classique dénommé le brut sans année (BSA). « Nous finissons à peine, en 2023, la distribution de la cuvée millésime 2004, confirme le chef de cave du champagne Pommery, Clément Pierlot. C’est un vin qui n’est commercialisé qu’en magnum (150 cl), à environ 2 000 exemplaires en fonction de la vendange. La prochaine édition sera le 2005. Nous le produisons chaque année depuis 2002 car il doit être un reflet fidèle non seulement du millésime, mais de notre terroir de 25 hectares répartis sur trois parcelles dont nos chardonnay, pinot noir et pinot meunier sont issus. » Il est en effet impératif, pour avoir le droit d’apposer le nom « Les Clos Pompadour » sur l’étiquette, que les raisins proviennent exclusivement de cet espace viticole.
Élaborer ce vin est une succession de contraintes : « Un vignoble situé en ville ne se gère pas de la même manière que ceux de la Montagne de Reims, dans la côte des Blancs ou encore dans la vallée de la Marne. Sa promiscuité avec la zone urbaine nécessite une adaptation permanente », confirme Clément Pierlot. Par exemple, au moment des vendanges, les murs entourant les vignes, en concentrant davantage la chaleur, accentuent la maturation des raisins. Les équipes doivent donc être encore plus attentives à la date de récolte, qui se fait manuellement pour ne pas vendanger des raisins trop mûrs.
Unique par son format et sa rareté, la cuvée « Les Clos Pompadour » se veut aussi un vibrant rappel des convictions de Madame Pommery, qui en avait fait le fruit de toutes ses expérimentations. Un véritable laboratoire permettant de tester grandeur nature les pratiques culturales nécessaires à un plus grand respect de la nature, et qui seront ensuite appliquées sur la totalité du vignoble de l’entreprise (un peu plus de 200 hectares). Tout est mis en œuvre pour favoriser la biodiversité. Au sein des Clos, il existe une grande variété de plantes et de mammifères. Une cinquantaine d’insectes, plus de 130 espèces végétales, 19 oiseaux comme le verdier d’Europe, la linotte mélodieuse ou encore le pic épeiche ont été répertoriés, ainsi que des mammifères : écureuil roux, lapin de Garenne. Le vignoble est enherbé et des moutons se chargent de l’entretien, assurant une meilleure empreinte carbone. Pour finir, des ruches permettent la production de miel des « Clos Pompadour ».
